Aude Grant est Directrice générale adjointe Asset management et Investissement chez SFL. Depuis la création du baromètre Paris Workplace en 2014, elle suit l’évolution de la perception des bureaux par les salariés franciliens. Avec des clients comme Blablacar ou Facebook, elle est un témoin privilégié de leurs nouveaux usages. Elle revient à l’occasion de la publication du Paris Workplace 2017 sur les défis qui se posent aux bureaux de la French Tech.
Pourquoi avoir dédié cette édition aux bureaux de la French Tech ?
D’abord parce que ce sont ces entreprises qui définissent les normes de demain. En auscultant les French Tech et leurs bureaux, nous dégageons des enseignements de portée générale, valables pour toutes les entreprises. Ensuite parce que beaucoup de fantasmes existent autour de l’univers de la Tech. Nous avons voulu mesurer le « vrai » niveau de satisfaction dans ces entreprises et regarder comment et pourquoi elles parviennent à générer un bien-être plus fort qu’ailleurs. L’atmosphère supposément cool et l’effervescence de l’entreprise en croissance ne suffisent pas à tout expliquer. Il y a aussi des partis pris forts en matière d’environnement de travail. Vous remarquerez d’ailleurs que nous ne parlons pas de « start-up »... Toutes les entreprises que nous avons interrogées sont nées avant 2012 et ont atteint un effectif qui les a contraintes à avoir une véritable réflexion sur leur stratégie immobilière.
N’y a-t-il pas un paradoxe à voir des salariés heureux au travail mais qui ne s’imaginent pas rester plus de cinq ans dans leur entreprise ?
Cela démontre l’enjeux colossal que représente la rétention des talents pour les entreprises de la Tech. Les salariés sont l’avantage compétitif et, la barrière à l’entrée d’entreprises qui n’ont, pour la plupart, pas d’outil industriel. De la même manière, les compétences sont à la fois le carburant, et la ressource rare pour les sociétés Tech. On parle d’un sujet vital, au sens propre du terme, c’est-à-dire qu’il engage l’avenir de l’entreprise.
« Cela démontre l’enjeux colossal que représente la rétention des talents. La réponse doit être à la hauteur : les Tech n’ont pour ainsi dire pas d’autre choix que d’investir dans des bureaux hyper-attractifs. »
La réponse doit donc être à la hauteur : les French Tech n’ont pour ainsi dire pas d’autre choix que d’investir dans des bureaux hyper-attractifs car elles ont affaire à une population devenue plus exigeante au fil des années : globalement, les salariés de la Tech sont attachés, davantage que les autres, à avoir des temps de trajets courts, à travailler dans des quartiers centraux, à profiter de bureaux qui ont une âme et qui sont conçus pour travailler vite et bien, si possible en équipe.
En quoi ces entreprises Tech préfigurent-elles l’avenir de l’immobilier tertiaire ?
Nous sommes entrés dans une période extraordinairement intéressante pour l’immobilier d’entreprise avec un changement de paradigme : désormais, c’est l’usage et les attentes des utilisateurs qui guident le métier. Il n’est pas surprenant de voir que les sociétés digitales, qui placent l’expérience utilisateur au cœur de leur modèle, appliquent les mêmes schémas de pensée à leurs propres bureaux et à leurs utilisateurs, c’est-à-dire leurs équipes. Le critère pour apprécier un lieu de travail, ce n’est pas le prix, ce n’est pas la conformité à telle ou telle certification, c’est la satisfaction des utilisateurs. Elle doit être suivie, mesurée, monitorée.