Pierre Giacometti, Président No Com : "Madrid, la métamorphosée"

Interview

Madrid, la métamorphosée

Président du cabinet de conseil NO COM établi à Paris et Madrid, Pierre Giacometti a vu la capitale espagnole se moderniser, s’internationnaliser, tout en misant sur des fondamentaux culturels puissants.

Quelles sont selon vous les forces de Madrid qui la rendent si attractive ?

Je pense qu’il faut remonter à 2020. J’entends souvent que les salariés madrilènes ont eu le sentiment d’être le plus durement touchés par un premier confinement très strict, avec des sorties parfois totalement interdites. Le retour à la normal est vécu d’autant plus positivement qu’au cours des confinements suivants, Madrid a revendiqué une forme de « seul contre tous », avec plus de liberté dans l’accès aux lieux de loisir et de culture notamment.

Avant le Covid, aviez-vous noté une dynamique ?

Des quatre capitales étudiées, Madrid est celle à la taille la plus « humaine », où l’on n’a jamais le sentiment d’être paralysé. Pour y vivre une partie de l’année, j’ai pu la voir se transformer profondément au cours des vingt dernières années. Madrid n’a pas les désavantages des mégalopoles, ce qui se ressent notamment dans les transports, qu’ils soient publics ou personnels. Trois fois candidate malheureuse à l’organisation des Jeux Olympiques, Madrid s’est dotée d’infrastructures modernes. Si elle a longtemps été complexée par rapport à Barcelone, ce n’est plus du tout le cas, notamment dans le contexte de revendications indépendantistes catalanes plus prononcées depuis une décennie.

Quelles différences culturelles observez-vous dans le rapport au bureau au quotidien ?

Madrid est la première ville latino-américaine d’Europe. Elle s’est fortement internationalisée, ce qui explique son attractivité. Cette influence latino a fluidifié les relations, l’organisation du travail s’est également développée : les Espagnols cassent plus facilement les codes statutaires que les Français qui restent attachés à la hiérarchie. Enfin, en matière de propreté ou de sentiment de sécurité, c’est le jour et la nuit. Conséquence : certains patrons de grands groupes vont jusqu’à se désoler que les Madrilènes soient réticents à une expatriation !

Comment le télétravail s’insère-t-il dans ce « nouveau » quotidien ?

L’Espagne est allée assez loin, puisqu’aujourd’hui deux jours de télétravail par semaine sont inscrits dans la loi. Mais l’attachement au bureau reste fort, notamment pour la génération des trentenaires qui ont vécu comme un soulagement le fait de retrouver leurs collègues. Dans la culture espagnole, le relationnel est primordial et l’isolement est vraiment exceptionnel. Au contraire, il ne se passe jamais une semaine dans une entreprise sans qu’il y ait une opportunité d’avoir une activité festive.