Guillaume Rossignol, directeur adjoint JRS France : "C’est au bureau que se créent les initiatives solidaires"

Interview

Ancien associé au cabinet De Pardieu Brocas Maffei, Guillaume Rossignol a choisi de mettre son engagement en faveur de l’aide aux réfugiés au centre de sa vie professionnelle. Il observe avec beaucoup d’attention la complémentarité qu’entreprises et ONG tentent de trouver.

Un jeune sur deux se dit prêt à accepter une baisse de rémunération pour travailler au sein d’une entreprise plus responsable. Cela vous surprend ?

Non pas du tout. La prise de conscience des employés est croissante, car eux comme les entreprises se rendent bien compte que travailler au bien commun rejaillit sur soi. Si l’entreprise est dans une démarche sincère, cela se ressent dans ses habitudes de travail, dans sa transformation, et dans sa façon de faire du business. La Covid a mis en évidence ce qui était latent : le sens de l’engagement a plus de valeur que la rémunération. Et ce que l’on observe, c’est qu’une fois qu’on a mis le doigt dedans, il y a un effet d’essaimage qui est difficile à arrêter.

Le lieu de travail peut représenter le lieu du changement, de l’engagement ?

Oui bien sûr. Mais attention : ses bureaux, il ne s’agit pas simplement de les partager sans s’engager. Ce que l’on voit lorsque nous nous déplaçons au cours d’ateliers de conversation entre personnes migrantes et employés, c’est l’importance de l’implication de l’entreprise. Le fait de se retrouver dans un cadre différent, un lieu physique, avec des personnes nouvelles est primordial. Cela favorise la conversation entre les employés eux-mêmes. Ils s’impliquent, se redécouvrent, se parlent différemment : la personne migrante est alors un créateur de lien. C’est très fort.

Près d’un Francilien sur deux pense que le bureau a un impact sur l’environnement écologique et social. Partagez-vous cette conviction ?

C’est un chiffre trop bas. De manière très claire, le bureau est un endroit qui génère du dynamisme et où se créent des choses. Je suis assez frappé de voir qu’en visio les gens se déconnectent dès la fin de la réunion. Il n’y a plus de place pour les temps « intermédiaires », alors qu’au contraire, l’informel est un moment important de créativité. C’est au bureau que l’on peut créer ces moments donnant naissance à des initiatives solidaires.

Alors, concrètement, comment faire plus ?

Il est très important de garder de la souplesse dans l’aménagement des espaces physiques. De même que nos emplois du temps ne sont pas totalement figés, il faut garder dans nos bureaux des espaces dont l’usage reste à déterminer. Une entreprise avec laquelle nous organisons des ateliers de conversation avec des personnes migrantes peut mettre en place ces rencontres justement parce que certains de ses espaces ne sont pas complètement affectés. Si tout est contraint, prédéfini, on n’a plus de place pour l’ouverture à l’autre.

Comment les entreprises peuvent-elles aider leurs employés à être en accord avec leurs engagements RSE ?

L’enjeu, c’est la coconstruction. Certains la voient comme un risque, mais il est bon à prendre. La RSE imposée par la direction traduit un certain volontarisme certes, mais peut se heurter à un problème d’appropriation. Pourtant, l’appropriation est centrale. Il faut donc mettre les salariés en situation de proposer la politique RSE de leur entreprise, pour que celle-ci ne soit pas vue comme une posture, mais bien comme une activité à impact.

Guillaume Rossignol, directeur adjoint JRS France